Aragon, l’an 2000 n’aura pas lieu
(1998) |
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Réalisateur : Bernard Dartigues Fiche technique: ici CASTING SYNOPSIS De toutes
les réalisations que Bernard Dartigues aura pu faire sur les travaux de
Philippe Caubère, Aragon est probablement la plus soignée. Ne s'effaçant plus
derrière son sujet, il l'accompagne à l'aide de superpositions musicales,
photographiques ou même filmiques, présentant parfois de très jolis plans
(les visages qui entourent Caubère...). Il est vrai que c'est le minimum pour
capter l'attention du spectateur pendant trois heures ! D'autant que ces
efforts sont un peu maladroits (nuits américaines, collages systématiques...)
quand on connaît le talent de Caubère. Mais il ne s'agit plus cette fois
d'une pièce de théâtre mais d'un recueil de poèmes. Lui-même communiste,
Philippe Caubère a profité d'une commande du Parti pour rendre hommage à ce
grand artiste qu'est Louis Aragon. Il fit donc sa sélection, qu'il sépara en
deux parties : "Le Communiste" et "Le Fou". La première
essentiellement politique, la seconde plus lyrique. Il s'efforce de
l'organiser de manière chronologique et ne se prive pas de chanter lorsqu'il
est accompagné par l'accordéon du très subtil Michel Macias ("chauffe
Macias, chauffe !" lance-t-il en référence au "Vesoul", de
Jacques Brel...). Il respecte le vers en ne le cassant pas, garde une tenue
toujours élégante (malgré quelques étonnants doigts d'honneur !), ce qui ne
favorise pas spécialement la compréhension des textes (ce fut d'ailleurs
probablement déchirant pour lui d'avoir à faire un choix !). Le résultat est,
bien entendu, trop long : cela n'empêche pas d'être conquis, emporté par
certaines séquences. Mais chacun fera le tri et retiendra les phrases, les
poèmes qui le touchent le plus ("L'an 2000 n'aura pas lieu",
"on voit à votre front le pli des habitudes", "la feuille
d'hier sur le calendrier"...) et enviera les poignées de spectateurs qui
purent voir ce spectacle dans ce cadre magnifique, une île du sud, où s'est
planté dans les tapis un grand drapeau rouge. Le jour fait place à la nuit,
des lumières au loin se laissent entrevoir. Il faut reconnaître que cet
environnement sied mieux à Caubère qu'à Aragon, mais qu'il est plutôt
charmant (le film s'ouvre sur une fiction naïve entre deux jeunes gens). Les
ajouts de Dartigues peuvent en revanche être très durs (plans des Juifs dans
les camps d'extermination, femme battant des corps à coups de parapluies...).
Le passé d'Aragon n'étant pas tout à fait clair (il s'est par exemple tu sur
le communisme russe), Caubère ajoute son paragraphe à la "Chanson de
France", qui n'avait pas prévu que les "têtes blondes"
parviendraient si bien à se métisser... |